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10/02/2014

La Cour de cassation qualifie les actes de chirurgie esthétique d’actes « de soins » 

La Cour de cassation qualifie les actes de chirurgie esthétique d’actes « de soins » au sens de l’article L.1142-1 II du Code de la santé publique. Quelles en sont les conséquences indemnitaires ?

La Cour de cassation (Civ. 1ère 5 février 2014 n°12-29.140) qualifie les actes de chirurgie esthétique et leurs actes préparatoires d’actes de soins au sens de l’article L. 1142-1 II du Code de la santé publique, alors même que l’intervention en question ne présente pas de visée thérapeutique.

Cette décision n’est pas sans conséquences sur le plan indemnitaire : il sera désormais possible d’être indemnisé par l’ONIAM en cas d’accident médical non fautif survenu lors d’une opération de chirurgie esthétique ou de ses actes préparatoires.

Le perfectionnement des techniques opératoires a favorisé un développement spectaculaire du nombre d’interventions de chirurgie esthétique pratiquées, dont les risques sont parfois sous estimés.

Deux catégories de risques sont rencontrées dans l’exercice de la chirurgie esthétique : ceux, parfois graves, liés à l’anesthésie et les complications pouvant survenir après certaines interventions délicates dans leur suivi post opératoire et médical.

La question de l’indemnisation de ce risque sanitaire est donc régulièrement posée : les patients sont visés par le texte qui limite l’indemnisation aux seuls risques connus à l’occasion d’un acte de « prévention, de diagnostic ou de soins », selon les articles L. 1142-1 I et II du Code de la santé publique.

L’article L. 6322-1 du Code de la santé publique prévoit que l’activité de chirurgie esthétique « n’entre pas dans le champ des prestations couvertes par l’assurance maladie au sens de l’article L. 321-1 du Code de la sécurité sociale » et rappelle un principe, jusqu’alors incontestable, posé par les juges.

Cette divergence entre les motifs « thérapeutiques » et « médicaux » apparaît également derrière la nécessité imposée par l’article 41 du Code de déontologie médicale (article R.4127-40 du Code de la santé publique) : « Le médecin doit s’interdire, dans les investigations et interventions qu’il pratique comme dans les thérapeutiques qu’il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié » (voir également l’article 16-3 du Code civil dispose qu’« il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité thérapeutique pour la personne […]»).

Un patient se soumettant à un acte à vocation esthétique ne pouvait donc jusqu’alors prétendre au bénéfice d’une indemnisation d’un acte de « prévention, de diagnostic ou de soins ».

Malgré ces conditions, minutieusement décrites par le législateur, il faut croire que l’indemnisation d’un tel risque est désormais possible.

En l’espèce, une jeune femme, âgée de 22 ans, est prise en charge dans un centre chirurgical pour une liposuccion.

Suite à l’injection de deux produits sédatifs, elle présente une perte de connaissance ainsi qu’un malaise cardiaque entraînant son décès.

La Cour d’appel de Paris estimait que le médecin et l’anesthésiste étaient responsables d’un manquement à une obligation d’information et de conseil entraînant une perte de chance de 30% d’éviter le dommage. Le décès relevant un accident médical non fautif, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) devait indemniser les ayant-droits de la victime.

Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation considère que « les actes de chirurgie esthétique, quand ils sont réalisés dans les conditions prévues aux articles L. 6322-1 et L. 6322-2 du Code de la santé publique, ainsi que les actes médicaux qui leur sont préparatoires, constituent des actes de soins au sens de l’article L. 1142-1 du même code »

Cet arrêt de la Cour de cassation est de première importance sur le plan indemnitaire : il en résulte la possibilité d’une indemnisation par l’ONIAM en cas d’accident médical non fautif survenu lors d’une opération de chirurgie esthétique.

A l’instar de l’extension réalisée par la Cour de Cassation, les commissions, comme les tribunaux, auront à l’avenir à se prononcer sur l’indemnisation d’accidents médicaux non fautifs qui ne possèderaient aucune motivation thérapeutique.