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08/02/2017

L’indemnisation amiable des victimes d’accidents médicaux questionnée

Selon le Rapport public annuel 2017 de la Cour des comptes, l’ONIAM intervient « comme un assureur qui s’attacherait à limiter sa charge de sinistre. »

« L’accès au dossier médical, qui fait partie intégrante du droit des malades, s’avère difficile » (Cour des comptes)

Clarifier le rôle et le fonctionnement des CCI, de la CNAMed et de l’ONIAM

En 2015, l’ONIAM, dressait un bilan flatteur de son activité en faveur des victimes : « Réduction des délais de traitement des dossiers, revalorisation du montant des indemnisations, accès facilité à l’information », toutefois…. « la réalité est bien différente », selon la Cour des comptes (Rapport public annuel 2017 – février 2017 – Cour des comptes – www.ccomptes.fr).

Sous l’intitulé « L’indemnisation amiable des victimes d’accidents médicaux : une mise en œuvre dévoyée, une remise en ordre impérative », les magistrats de la rue Cambon dressent un bilan peu flatteur de l’ensemble du dispositif.

Afin de ne pas les paraphraser, nous en reproduisons quelques extraits.

La loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a créé un droit à l’indemnisation de l’aléa thérapeutique financé par la solidarité nationale et mis en place une procédure amiable d’indemnisation des accidents fautifs et non fautifs.

Or, après 15 années d’existence de la loi dite « Kouchner » les résultats de l’Office National d’indemnisation des accidents médicaux sont « très éloignés des objectifs » fixés.

L’ONIAM décideur à la place des commissions

Ainsi : « Dépendant de l’ONIAM pour l’allocation de leurs crédits de fonctionnement, n’ayant aucun pouvoir hiérarchique sur les agents que celui-ci leur affecte, les présidents de CCI sont mal armés pour défendre les prérogatives attachées à leurs fonctions contre les empiètements de l’office quand il devient décideur à la place des commissions. » […].

« À réception de l’avis favorable de la CCI, l’office réexamine en effet la recevabilité du dossier au regard du critère de gravité ou de la nature même d’accident médical. Il se donne la faculté d’informer la victime qu’il « ne partage pas l’avis de la commission concernant la survenue même d’un accident médical ». » […].

L’ONIAM, selon ses dires, consacre environ 0,8 M€ par an à son service médical, composé d’un médecin généraliste, de deux internes des hôpitaux et depuis peu d’un chirurgien à mi-temps, dont aucun n’est agréé par la CNAMed, ainsi qu’à des expertises externes.

Or, relève la Cour des comptes : « Le législateur n’a pourtant confié à l’ONIAM aucune attribution d’ordre médical. »

Le rapport met en exergue divers exemples encadrés : « Une CCI estime que le décès d’une patiente à la suite d’une embolie pulmonaire est indemnisable au titre d’un accident non fautif. L’ONIAM refuse de payer sur avis de son service médical, au motif contredit par la CCI d’absence de littérature médicale et en affirmant que l’embolie ne résulte pas de la chirurgie intervenue deux jours plus tôt. L’avis du service de l’ONIAM est exprimé en dehors de toute procédure contradictoire. » […].

« Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que le nombre de saisines directes des tribunaux par les victimes soit passé de 9 % des demandes amiables en 2011 à 16 % en 2015, alors que le nombre de dossiers déposés devant les CCI stagne. »

Un dispositif peu performant

Les délais de traitement des dossiers s’allongent.

En quatre ans, de 2012 à 2015, le stock d’avis à traiter par l’ONIAM a augmenté de 641 dossiers, soit l’équivalent d’une année d’activité.

Le nombre d’offres de réparation intégrale ne dépasse pas 13 % des avis reçus au bout de douze mois, le délai légal de quatre mois n’étant quasiment jamais respecté. Alors que la loi n’a distingué que deux catégories d’offres, l’offre qui vise à la réparation intégrale de tous les préjudices subis et l’offre provisionnelle dans le cas où l’état médical de la victime n’est pas stabilisé, l’ONIAM a surtout présenté des offres partielles et des offres dites définitives, non prévues par les textes.

Au total, le temps de traitement de l’ONIAM multiplie par deux, voire plus, la durée de traitement du dossier par la CCI.

« De nombreuses et graves défaillances de gestion », « Les carences du recouvrement sur les assureurs », « Une gestion budgétaire et administrative laxiste » et ainsi de suite.

« Mieux accompagner les victimes »

« L’accès au dossier médical, qui fait partie intégrante du droit des maladess’avère difficile. Devant les réticences des établissements et professionnels de santé, un système d’astreinte, voire le cas échéant un délit d’entrave, pourrait être instauré, l’absence de production dans un délai à déterminer d’un à deux mois après la demande étant sanctionné par une amende. »

« Constituer un vivier suffisant d’experts »

« Au-delà de la question de la qualité de l’expertisela rareté des expertsnotamment dans des spécialités pointues, pèse sur les délais d’instruction des CCI. »

Audi alteram partem : pour que le principe du contradictoire soit respecté, il faut également lire les réponses transmises aux magistrats de la rue Cambon.

Le CISS indique pour sa part : « Après la lecture de votre rapport, nous tenons à vous confirmer que nous partageons les constats et les appréciations que vous avez faits. »