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23/03/2018

Preuve de l’origine et rappel de la définition du caractère nosocomial d’une infection

Revue droit & santé numéro 84 (Proof of origin and reminder of nosocomial definition of infection). Conseil d’État, 23 mars 2018 : n° 402237. Pierre-Yves CHAPEAU, avocat.

Image d'illustration Code civil

Responsabilité : preuve de l’origine et rappel de la définition du caractère nosocomial d’une infection

Le 14 janvier 2003, une patiente âgée de 76 ans est admise au service des urgences du centre hospitalier intercommunal (CHI) d’Elbeuf-Louviers-Val-de-Reuil, victime d’un accident vasculaire cérébral.

Dix jours plus tard, elle est transférée au service de réanimation en raison d’une détresse respiratoire liée à une inhalation broncho-pulmonaire.

Durant les deux années qui s’ensuivent, la patiente est plusieurs fois hospitalisée et présente des complications infectieuses.

Elle décède le 6 mai 2005.

Sa fille formule alors une demande indemnitaire tant contre le CHI qu’envers l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam).

Par un jugement du Tribunal administratif du 19 mars 2015, le juge administratif retient la responsabilité de l’hôpital en raison de l’infection nosocomiale dont a été victime la patiente et spécifie que si l’infection n’était pas à l’origine de son décès, elle avait entraîné des souffrances et un déficit fonctionnel temporaire.

Par un arrêt du 21 juin 2016, la Cour administrative d’appel de Douai annule le jugement de première instance.

La haute juridiction administrative, dans un arrêt de section du 23 mars 2018, étaye la réflexion relative au caractère nosocomial d’une infection.

En effet, l’article L. 1142-I alinéa 2 du Code de la santé publique dispose que : « Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère ».

Toutefois, le Conseil d’État rappelle « que doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d’un patient et qui n’était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s’il est établi qu’elle a une autre origine que la prise en charge ».

Or, en l’espèce, il apparaît que la patiente a été victime d’une infection dont l’origine résulte de la régurgitation du liquide gastrique qui avait pénétré dans ses bronches en raison d’un trouble de la déglutition consécutif à l’accident vasculaire cérébral.

Au regard des conclusions du rapport d’expertise, l’infection résulte de la pathologie de la patiente ayant nécessité son hospitalisation et non pas des actes pratiqués dans le cadre de la prise en charge, encore moins de l’environnement dans lequel sa maladie a évolué.

Le juge administratif rappelle ici que la responsabilité des hôpitaux ne peut être continuellement engagée dès lors qu’ils prouvent que l’infection déclarée à l’hôpital n’y a pas été nécessairement contractée, effaçant de facto le caractère nosocomial de l’infection (CE, 21 juin 2013, n° 347450, Centre hospitalier Émile-Roux du Puy-en-Velay : JurisData n° 2013- 012507, Lebon 2013, p. 177 ; JCP A 2013, act, 578, obs. M. Touzeil-Divina ; JCP A 2013, 2361, obs. Ch. Paillard).

La charge de la preuve de l’origine de la maladie nosocomiale appartient donc toujours à l’établissement qui connaît une présomption simple de responsabilité, renversée en cas de cause étrangère.

Autrement dit, en l’espèce, la présomption de responsabilité est renversée du fait de la pathologie de la patiente inhérente à la prise en charge hospitalière de celle-ci.