La Sécurité routière peut-elle mieux faire ?
La hausse de la mortalité sur la route semble indiquer que les mesures prises depuis quarante ans, dont le succès ne saurait être contesté, ont atteint leur seul d’efficacité maximale. Dès lors, quels leviers actionner pour atteindre l’objectif annoncé de moins de 2.000 morts sur les routes en 2020 ?
Sécurité routière : comment renouveler les efforts ?
Les derniers chiffres de la Sécurité routière indiquent que la mortalité sur les routes de l’hexagone est repartie à la hausse en 2015.
Pour y faire écho, une nouvelle campagne de sensibilisation, Onde de Choc, qui met l’accent sur les conséquences des accidents sur les proches, a été lancée.
Les avocats spécialisés en réparation du dommage corporel, qui interviennent comme nous le faisons exclusivement dans la défense des victimes d’accidents de la circulation et de leur famille, constatent quotidiennement que derrière chaque accident, les vies de familles entières sont brisées.
La sécurité routière : un enjeu majeur de sécurité et de santé publique
Faut-il le rappeler : la sécurité routière constitue un enjeu de sécurité, mais également de santé publique majeure.
Selon un sondage de l’IFOP, 47 % des français connaissent un proche qui a déjà été touché par un accident de la route, soit au bas mot 23 millions de personnes (Sondage IFOP pour la délégation à la sécurité et à la circulation routières, janvier 2016).
Toutefois, l’émotion liée à chaque drame et la reprise de la mortalité sur les routes constatée depuis décembre 2014 ne doivent pas cacher les progrès structurels en matière de sécurité routière.
En 1972, année « horribilis » 18 034 personnes avaient trouvé la mort sur la route, et près de 400.000 avaient été victimes de blessures corporelles. Cette véritable tragédie avait poussé les pouvoirs publics à intervenir et à créer la Mission interministérielle de sécurité routière.
En quarante ans, la mortalité a donc été divisée par cinq, alors que dans le même temps, le trafic routier a été multiplié par 2,4, selon les chiffres de la Sécurité routière. On estime que plus de 300.000 vies ont été épargnées en quarante ans.
Vitesse, alcool, port du casque et de la voiture, siège auto obligatoire… La France dispose d’un dispositif législatif développé au sens des facteurs de risque identifiés par l’Organisation mondiale de la Santé.
La situation est-elle améliorable ?
Dès lors, quels leviers actionner pour atteindre l’objectif annoncé de moins de 2.000 morts sur les routes en 2020 ?
Le très intéressant article de la Revue Science et Santé de novembre/décembre 2015, « Sécurité routière, Peut-on mieux faire ? », envisage plusieurs pistes.
La première question, loin d’être théorique, consiste à se demander si le taux de mortalité routière tel que nous le connaissons en ce milieu des années 2010, est améliorable.
Interrogée sur le sujet, Manuelle Salathé, Secrétaire générale de l’Observatoire National Interministériel de Sécurité Routière, se veut optimiste : « La mortalité routière en France, après avoir chuté en 15 ans, a-t-elle atteint un plancher de verre ? Non. Rapportée à la taille du pays, elle est deux fois plus élevée qu’en Angleterre ou qu’en Suède ! Mais elle a changé de visage. La plupart des populations vulnérables (piétons, cyclistes, cyclos et motos) a augmenté (43 % en 2014, contre 31 % en 2000). Agir sur ces populations relève de la haute couture »
Constat partagé par tous les experts : on peut considérer que les mesures de « macrosécurité » mises en place depuis quarante ans ont fait leur office. Place désormais aux mesures « micro », plus affinées, plus précises, en un mot plus ciblées.
« Si les progrès semblent à l’arrêt depuis deux ans, c’est que plus nous approchons de l’asymptote, plus il est difficile d’agir », corrobore Emmanuel Lagarde, épidémiologiste au Centre de recherche en épidémiologie et biostatique (Unité Inserm 897), toujours dans la même revue.
Les prochaines mesures ont donc vocation à cibler des catégories de populations plus précises. Ce qui est politiquement nettement plus délicat.
« L’action politique est donc ciblée avec, à chaque fois, un arbitrage entre privation de liberté et responsabilité vis-à-vis d’autrui. Par exemple, puisque la voiture est une source d’autonomie pour les personnes âgées, il est impensable de simplement leur retirer le permis sur les critères d’âge ou de santé, malgré leur suraccidentalité avérée », poursuit Emmanuel Lagarde.
La même problématique se pose s’agissant des médicaments.
Les prochaines actions risquent donc d’être très différentes des politiques de prévention qui se sont succédées depuis quatre décennies.
Une gageure subsiste : renouveler les messages sans faire l’impasse sur les fondamentaux.
Les chiffres de 2015 prouvent qu’un relâchement généralisé a eu lieu concernant la vitesse, notamment sur les voies rapides…