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02/04/2014

Le Conseil d’État condamne le centre hospitalier de Senlis pour n’avoir pas détecté le handicap d’un enfant, privant ses parents de la liberté de recourir à une interruption de grossesse.

Il est reproché à l’établissement de n’avoir pas vérifié que l’enfant ne présentait pas d’anomalie, en l’espèce un syndrome caractérisé par «d’importantes malformations».

Par un arrêt du 31 mars 2014, le Conseil d’État condamne le centre hospitalier de Senlis à indemniser les parents qui subissent un préjudice résultant de troubles importants du fait du grave handicap de leur enfant. 

L’expertise médicale a fait état d’une « absence de contrôle visuel direct du membre supérieur droit », cependant que les comptes-rendus d’échographies précisaient que le fœtus comportait quatre membres « de mobilité et de segmentation satisfaisante ».

C’est donc l’absence de vérification de la conformité des quatre membres du fœtus qui s’avère fautive.

Elle constitue, selon le Conseil d’État une « conséquence directe de la faute caractérisée commise dans la réalisation de l’échographie ».

Ainsi : « Il résulte de l’instruction que les comptes rendus des trois échographies réalisées au sein du centre hospitalier de Senlis mentionnent que le foetus disposait de quatre membres, de mobilité et de segmentation satisfaisante ; que, toutefois, il ressort des constations du rapport d’expertise que de telles affirmations ne peuvent résulter que d’une absence de contrôle visuel direct du membre supérieur droit lors de la réalisation des échographies, notamment celle de la vingt-deuxième semaine d’aménorrhée, soit que ce membre n’ait fait l’objet d’aucun contrôle, soit qu’il ait été confondu avec le membre supérieur gauche ; qu’il ne résulte en outre pas de l’instruction, notamment des comptes rendus mentionnés ci-dessus, que la réalisation des examens échographiques sur Mme A…aurait présenté des difficultés particulières ; que, dès lors, dans les circonstances de l’espèce, l’absence de vérification de la conformité des quatre membres du foetus constitue une faute qui, par son intensité et sa gravité, est caractérisée au sens du troisième alinéa de l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles ».

En effet, si l’erreur de diagnostic prénatal ouvre droit à réparation encore faut-il démontrer que cette erreur est une faute privant les demandeurs de la possibilité de recourir à une interruption de grossesse.

Il appartient, par conséquent, aux parents de démontrer que la connaissance du handicap les aurait conduit à recourir à l’avortement.

Il convient de rappeler, qu’aux termes de la loi du 4 mars 2002, l’erreur de diagnostic prénatal ne permet que l’indemnisation des parents, à l’exclusion de l’enfant lui-même et qu’elle suppose, outre la démonstration d’un préjudice consistant dans la perte de chance d’avoir pu recourir à une interruption de grossesse, la preuve de l’existence d’une faute caractérisée à l’origine de ce préjudice :

« Nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance. […]. Lorsque la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d’un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d’une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l’enfant, de ce handicap. La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale ».

(Conseil d’État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 31 mars 2014, N° 345812)